La légende de Lucie Pracomtal
Au début du XVIIIe s, le château appartient à la famille de Pracontal. En 1715, Lucie de Pracontal, âgé de 18 ans, se marie avec le seigneur de Quinsonnas. Une foule très nombreuse
se presse pour l’événement, jusque dans la petite église du village. Ensuite, tout le monde revient au château. On commence à servir à boire, à manger quelques sucreries et des fruits en
attendant le grand banquet du soir. Lucie fait de même, prend un fruit sec qu’elle veut couper
en deux pour donner la moitié à son mari. Mais le manche du couteau dérape et vient taper contre l’alliance… qui se brise en deux par terre. Oups ! Terrible présage… Le silence se fait un moment, la mariée pâlit. Elle finit par se reprendre et change de conversation : et si on jouait à cache-cache ? Tous les invités prennent part au jeu pendant une heure. Puis vient l’heure du repas. Une seule personne manque à l’appel : Lucie ! On la cherche dans ses appartements, dans tout le château, le parc… mais rien. Soudain, les parents de Lucie se mettent à penser à ce trou béant au milieu de la pelouse, sous un des murs de la façade. Un abîme sans fond qui engloutirait celui qui y tomberait…
Des accidents étaient déjà arrivés. On se précipite alors devant ce trou, et persuadé que la jeune femme est tombée là, on se met à partir à sa recherche, le marié le premier. Mais en bas, aucune trace de Lucie, pas une trace !On passe la soirée à parcourir cette brèche dans les
moindres recoins. Pendant ce temps, on fouille le puits et le village de Montségur, car des gens du voyage installés là aurait pu agresser la jeune fille pour lui voler ses beaux bijoux. Mais toujours rien ! On ne savait pas ce qu’était devenu Lucie. Et sans corps, les parents ne peuvent pas faire leur deuil.
La mère fait placer devant la brèche une petite croix avec ces mots, « Lucie de Pracontal, 25 juin 1715 », mais aussi une petite muraille pour éviter que pareil accident ne se reproduise. Puis la mère se retire loin de son château, se réfugiant dans la prière. Mais déjà la légende d’une
Dame blanche fleurit…Les années passent. Nous voilà en 1745. Le château n’est plus habité que par un gardien qui le fait visiter aux touristes de passage. Trois jeunes gens de la région, Paul de Causans, Louis de Crussol, Maurice de Rabasteins, justement, veulent y faire un tour. On leur fait visiter toutes les pièces. Arrivé devant le trou, le gardien raconte l’histoire de Lucie. Et puis, il les laisse refaire le tour du château. Les jeunes gens se mettent à jouer à cache-cache ! Maurice de Rabasteins sent qu’il va dénicher la meilleure cachette… Il traverse plusieurs pièces, puis s’arrête dans l’une d’elles, en très mauvais état.Il entend ses amis rire juste à côté, alors il se rabat brusquement contre le mur pour ne pas être vu. Mais là, il sent le mur se dérober ! Maurice vient de tomber dans une sorte de couloir, fermé par un mécanisme secret qu’il a dû actionner sans faire exprès. Il décide de s’y enfoncer ; le couloir est très, très étroit, très sombre ! Il sent sous ses doigts, dans le mur qu’il tâtonne, un autre mécanisme. Une porte s’ouvre, donnant sur une petite chambre. Se tenant toujours à la porte, il se penche un peu, mais glisse, tombe, et la porte… se referme derrière lui ! Pas de verrou, pas de poignée… Le cœur battant, Maurice découvre qu’il s’est fait enfermer. La pièce est uniquement éclairé par deux petits soupiraux. Tentant de calmer les battements de son cœur, il commence à s’habituer à la pénombre : ses yeux détaillent le mobilier sommaire, une sorte de lit, un fauteuil, une petite table… et s’il se trouvait dans la cachette du baron des Adrets ? Dans le fauteuil, il distingue une forme humaine comme… endormie. Mais son sang se glace quand il s’aperçoit qu’elle ne dort pas et qu’elle porte une robe de mariée… Lucie ! La voilà, celle qu’on croyait disparue, qui a fini sa vie ici, enfermée, morte de soif et de faim ! Le même sort l’attend… Horrifié par ce terrifiant corps momifié, il commence à hurler. Mais sa voix ne porte pas loin, les murs sont trop épais. Il ne peut pas non plus s’enfuir par le soupirail. Non, la situation semble désespérée… et la nuit tombe. Pendant ce temps, ses amis le cherchent, là-haut ! Toute la nuit… Au petit matin, Maurice se fait réveiller par deux yeux jaunes : un chat ! Le matou revient le voir plusieurs fois, et repart toujours par le soupirail. Le jeune homme saisit sa chance : il attache sa cravate autour de l’animal et le lance par la petite ouverture. Les amis tombent sur le chat dans la journée et reprennent espoir : en suivant le chat, peut-être qu’ils trouveront leur ami…
Effectivement, le félin finit par retourner dans le soupirail à la nuit tombée. Maurice est là ! Ils se mettent à élargir l’ouverture, et le sauvent de sa prison. En deux jours, ses cheveux sont devenus tout blancs…
La mère de Lucie viendra reconnaître sa fille. Des ouvriers appelés-là ne découvrirent jamais comment le baron des Adrets faisait pour ouvrir la porte de l’intérieur. On plaça Lucie dans une chapelle construite dans le château ; tout cela a été détruit en 1793..